Je m'appelle Arthur. Mon métier c'est de soulager les gens. Non je ne suis pas docteur, ni même dealer. Le soulagement que je propose est bien plus radical. Je suis snipper. Je sais c'est pas courant. Mais que voulez-vous, y'a pas de sots métiers. Je fonctionne sur contrat, tout simplement. Pour agir il me faut un nom, un prénom, une adresse. En échange je vous envoie un rib en SMS. Une fois la transaction effectuée, 48h après, au plus tard vous êtes informés en retour. Je joins toujours une photo avec mon compte-rendu ainsi que la date et l'heure où à eu lieu votre « soulagement ». C'est relativement simple comme manière de faire, et je crois que mes clients apprécient.

 

Je ne les rencontre jamais, eux non plus. Je fonctionne par recommandations uniquement. Le plus dur ça a été de démarrer dans ce métier. Quand tu ne connais personne il faut s'imposer. Alors au début tu fais ça gratis, pour t’entraîner ou même avant qu'on te demandes, puis tu viens réclamer ton dû après. J'aime bien mon métier, pas salissant, pas d'horaires, pas de patron. Je suis libre de mes décisions. Je procure de la joie chez mon commanditaire, et parfois un certain soulagement chez mes victimes.

 

Ce soir je fête mon 100eme tir. Je suis en planque depuis hier en face de son appartement. Je connais tout d'elle. Son nom, Agathe Dusy, sa couleur de cheveux, son parfum, le nom de son chat, de son patron, sa passion du chocolat, son horreur du rap et même la couleur de ses sous-vêtements. Je sais qu'elle donne le change à son boulot, qu'elle ne semble pas heureuse, et qu'à priori elle vit seule. Son portable n'arrête pas de sonner, elle y répond avec parcimonie, comme pour se donner de l'importance et se faire désirer. Mon client m'avait averti, elle est belle, ne pas s'en émouvoir. Vendredi, Paris, place de la Madelaine, 3eme étage, elle rentre chez elle. Je m'allonge au sol, œil rivé sur le viseur, canon bien en ligne, fenêtre entre-ouverte. Je sens la vitesse du vent, j'ajuste ma visée. Je l'observe un peu par la lunette du fusil... elle à l'air tendue... terriblement tendue. Elle rentre de son travail, à la bourse et bien qu'elle est eu une journée de bureau, je la trouve particulièrement ravissante, comme si elle allait rencontrer son galant d'un instant à l'autre. D'ailleurs depuis son départ ce matin, elle a troqué son tailleur et chemisier, contre cette robe rouge qui semble avoir été dessinée pour elle. Elle s'avance vers la fenêtre, jetant un regard nonchalant vers le bas. Elle se fige quelques instants, peut-être attends-elle quelqu'un ? Peut-être se sent-elle observée ? Je ne réfléchis pas plus en avant, je saisi ma chance.

 

Rapide, précis, un balle en plein cœur. La belle virevolte sur elle-même et s'effondre comme une poupée de chiffon. Elle disparaît sous la fenêtre hors de mon champ de vision.

 

Je range mon matériel, canon, crosse, lunette et silencieux finissent dans mon sac à dois. Je nettoie rapidement la pièce. Il est temps de faire mon compte-rendu. Je descend les marches de l’hôtel, lunettes noires au nez, je salue le gardien de l’hôtel. Je traverse la rue un peu plus bas. J'entre dans l'immeuble d'Agathe, 3eme étage. Je m'apprête à crocheter la serrure de son appartement avant de me rendre compte qu'elle n'avait pas pris soin de la fermer. J'entre. Elle est là étendue sur le sol, les jambes repliées, déchaussée, vêtue d'un très belle et douce robe rouge. On ne voit quasiment pas le sang dégoulinant sur le tissus. On pourrait presque penser qu'elle c'est juste endormie. Je photographie avec mon portable. Je compose le MMS, photo, lieu, heure. J’envoie à mon client. Je la regarde une dernière fois... ma 100eme était belle... Tout à coup le téléphone d'Agathe sur la table se met à vibrer. Machinalement je jette un œil... elle vient de recevoir un MMS...

Crédit Photo : tpsdave / pixabay

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